→ Dehors à 05:30 pour fumer ma première cigarette. Petite pluie froide et rafales de vent.
Vitrine de la fleuriste Pierflor, samedi 4 février 2017
Debout à cinq heures du matin, comme trop souvent ces derniers semaines. Le soir je tombe comme une masse, la nuit j'écrase comme une marmotte, mais tôt le matin mes pensées me réveillent. En ce moment j'organise mes propres funérailles. Le décès du dernier parent nous oblige à reconsidérer de plus près les frais que devront engager les frères et soeurs à l'heure de notre mort, et nous invite à les soulager des soucis administratifs liés à ce triste événement. Perso je balance encore entre la crémation et l'inhumation. Le feu a l'art et la manière de boucler en deux heures le processus de disparition du corps. Les survivants n'ont pas à imaginer l'horrible spectacle de la décomposition des leurs, et ce durant deux longues années, ce qui est interminable n'est-ce pas ? D'un autre côté, j'ai assez dit et répété que j'aimais à me promener dans les cimetières tout comme je le ferais dans des jardins. Du coup je m'interroge, et je ne sais plus que décider. Il va pourtant falloir que j'arrête ma décision car j'ai rendez-vous ce mercredi 8 février pour signer une convention obsèques. Il y a des tas de choses à prendre en compte avant de signer ce foutu papier : les fleurs par exemple. Certaines personnes demandent à être couvertes d'un tas de fleurs. Moi je ne veux pas. Il m'est resté, des funérailles de mon père, ce parfum écoeurant de brassées de fleurs en train de mourir, dont la plupart sont parties au feu avec lui. Quelques petits bouquets de fleurettes jaunes suffiraient à mon bonheur ... si je suis encore en état, à ce moment là, d'éprouver quelque chose. Voilà qui soulève un tout autre genre de question : qu'est-ce que ça peut nous faire, ce qu'on va devenir après notre mort, entendu qu'on ne sent plus rien, qu'on ne sait plus rien ?
Tout ceci, me direz-vous, est bien morbide, mais ce sont là des questions que nous sommes plus ou moins tenus de nous poser de notre vivant, ne serait-ce que par respect pour les proches qui nous survivront, et qui ont besoin de connaître nos dernières volontés. Dernières volontés que l'église traditionaliste, entre parenthèses, a tôt fait de balayer d'un revers de main pour imposer à la famille l'inhumation du corps, quand bien même le mort aurait spécifiquement opté pour la crémation. Une raison de plus de mettre à plat, très officiellement, chaque point de nos funérailles, et de nous en remettre au professionnalisme d'un expert en la matière. Après tout, une convention obsèques est un contrat qui vaut n'importe quel autre contrat. Il ne s'agit pas, le moment venu, d'y porter un coup de canif ou même un coup de poignard, sous prétexte qu'il est plus confortable pour les vivants de se recueillir sur une tombe. Notre vie nous appartient. Nous avons bien le droit de discuter des termes de notre propre mort.
Je sais que j'évoque ici des sujets pénibles, et je vous prie de bien vouloir m'en excuser. Le blog est sans doute le seul moyen pour moi d'exprimer ce que je pense et ce que je ressens. Hier, je déplorais de ne pas recevoir beaucoup de commentaires. J'avais vraiment l'impression de m'enfermer dans un monologue sans issue. Mais vous avez été nombreux à réagir sur mon dernier article et je vous en remercie. Je ferai l'effort de vous répondre et de vous rendre visite au cours du week-end, sachant qu'aujourd'hui je passe une partie de la journée chez maman. Ce sera peut-être la dernière fois que je me trouverai dans son appartement. "Les dernières fois" jonchent, depuis un mois et quelque, mon chemin de vie. Il faut dire adieu, faire son deuil d'un tas de choses si chères à mon coeur. Ce n'est pas facile. Je compte sur vous pour essayer de me comprendre et de me pardonner.